|
Du
Nouveau sous le Soleil
Nous savons tous que la présence de la vie sur la terre
doit beaucoup à la présence, près de
notre jolie boule bleue, d’un voisin bouillonnant, le
soleil. Et les sources d’énergie fossiles (pétrole,
charbon, etc…) que nous exploitons aujourd’hui
ne sont que du « soleil concentré ». Les
hydrocarbures n’étant que des résidus
de plantes qui ont poussé grâce à la photosynthèse,
utilisant du CO2 et du soleil… L’exploitation
directe de cette énergie est donc un rêve universellement
partagé, à tel point qu’on se demande
ce qu’on attend pour le poursuivre…
Le Soleil nous envoie en chaleur en une journée l’équivalent
de 500 fois ce que nous consommons en un an sur toute la planète.
Malheureusement, nous la recevons sous la forme d’une
pluie très fine de rayons par forcément faciles
à concentrer. Imaginez-vous contraint d’inventer
une technologie qui promette de récupérer l’énergie
produite par la chute de chaque goutte d’eau d’une
pluie… Un casse-tête évident qui explique
que la technologie solaire n’en soit encore qu’à
ses balbutiements, malgré un avenir qu’on sait
prometteur.
Pourtant en 2004, à Berkeley, nous avons rencontré
le fondateur de Powerlight, une société qui
démontre qu’une exploitation commerciale rentable
du solaire est dès aujourd’hui possible. Tom
Dinwoodie a transformé en moins de 10 ans un magasin
à unique employé en une start-up florissante
et rentable, employant 100 personnes et exhibant fièrement
un chiffre d’affaires de plus de 50 Millions de $…
Tom Dinwoodie est un ingénieur tombé amoureux
d’une technologie, « le solaire est la plus élégante
des technologies, qui une fois posée, emmagasine de
l’énergie et produit de l’électricité,
simple et magique ! ». Après une enfance dans
le Nebraska, et des études scientifiques, il devient
chercheur au prestigieux MIT de Cambridge où il étudie
les composants photovoltaïques, cœur de la technologie
du solaire électrique. À l’époque,
les coûts sont encore largement prohibitifs donc ses
premières tentatives d’entrepreneur ont lieu
dans le domaine de l’éolien. Mais un premier
amour, ça ne s’oublie pas comme ça. Un
beau jour d’été, rongeant son frein en
plein embouteillage sous un soleil de plomb, il décide
de franchir le pas.
L’énergie solaire a un avenir commercial. Il
entend bien le démontrer.
De 1991 à 1995, toute son énergie et ses économies
sont consacrées à la fabrication d’un
prototype pour toit solaire. Les temps sont durs, il nous
confie qu’il n’existe aucune façon de cuire
une pomme de terre qu’il ne connaisse pas. Mais Tom
Dinwoodie a un atout décisif, il a complété
sa formation d’ingénieur par un diplôme
d’architecture. Or son prototype de brique solaire,
consistant en un panneau posé sur une brique de polystyrène,
répond mieux que personne aux contraintes architecturales
des toits. Il n’abîme pas la surface du toit en
étant léger et se fixe sans perforer la structure.
Mais l’investissement le plus important d’un toit
est celui des matériaux d’isolation résistant
à la chaleur du soleil. La brique de Powerlight transforme
cette contrainte en opportunité, le soleil ne fait
plus fondre les couches d’isolant mais produit de l’électricité…
Cette astuce assure le succès commercial de Powerlight
sur cette niche. Après un premier hôtel à
Hawaï en 1995, de nombreux clients adoptent la technologie
comme US Postal, Johnson & Johnson ou Toyota pour une
de ses usines. Le retour sur investissement de ces clients
s’étale entre 1 à 10 ans, mais la durée
de vie de la technologie, ne comportant aucun mécanisme
mobile susceptible de s’user, est garantie pour 25 ans.
L’exploitation du solaire photovoltaïque n’étant
encore qu’à une échelle confidentielle
aujourd’hui, les coûts de production restent élevés.
Et de nombreuses subventions à l’investissement,
et des commandes publiques ont contribué au succès
de Powerlight. Les coûts de production ont baissé
de moitié entre 1995 et 2003, mais la production à
large échelle qui permettrait de rendre cette technologie
compétitive se fait attendre. Tom Dinwoodie nous assure
qu’un parc de 50 miles de rayon suffirait à produire
la totalité de l’électricité aujourd’hui
consommée aux Etats-Unis. Les surfaces inexploitées
de toitures étant considérables, la contrainte
n’est donc pas tant technique qu’économique.
Avec la raréfaction des énergies fossiles traditionnelles,
les contraintes esthétiques de l’éolien
et les dangers d’une prolifération du nucléaire,
le choix énergétique du siècle qui s’annonce
se fera entre le charbon, dont les ressources sont encore
larges, et le solaire. La combustion du charbon à l’échelle
de notre activité rendrait l’air irrespirable
et accentuerait massivement le dérèglement climatique.
La transformation de nos économies développées
et les choix politiques de pays tels que l’Inde, mais
surtout la Chine (qui a la puissance et l’échelle
suffisante pour rendre le solaire disponible à bas
prix) seront déterminant. Le débat s’annonce
passionné et passionnant.
|