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L'architecte
du futur bâtiment durable
S’il existe un secteur où l’engagement
dans le Développement Durable est ingrat, c’est
celui de la construction. Les efforts pour parvenir à
faire changer les pratiques sont herculéens, la médiatisation
de la lutte quasi nulle et pourtant, l’effet de levier
sur notre impact environnemental est colossal…
Dominique Bidou est l’homme qui a engagé cette
lutte en France, il est président de l’Association
pour la norme HQE (Haute Qualité Environnementale)
qui tente d’engager une réflexion au sein du
secteur du BTP sur ses impacts environnementaux. Poser la
question de l’environnement à un secteur qui
représente en France à lui seul plus de 90 Milliards
d’euros et près d’un cinquième du
PIB (services liés inclus), c’est comme si un
colibri essayait de convaincre un éléphant de
vivre dans un nid… C’est loin d’être
facile !
Pour faire évoluer les mentalités, Dominique
Bidou ne s’est pas converti en « ayatollah vert
» qui s’enchaînerait sur les grues pour
arrêter les constructions. Non par manque de convictions
car Dominique Bidou est un militant de la première
heure, engagé en écologie politique dès
1977. Mais son tempérament posé le pousse davantage
à préférer la concertation. D’où
l’idée de la démarche HQE, qui est née
d’une réflexion menée par des représentants
de nombreux secteurs impliqués : les constructeurs,
les promoteurs, les architectes, les clients et les collectivités
locales.
Après un passage au cabinet ministériel de Brice
Lalonde en 1988, il est chargé en 1992 par Nicole Ameline
de rédiger le premier rapport posant la question de
l’impact environnemental du secteur du bâtiment.
Il gagne la légitimité de mener ce dialogue
qui aboutit à une série de recommandations concrètes
qui font d’un édifice un bâtiment certifié
HQE.
Le premier bâtiment répondant à la démarche
de Haute Qualité Environnementale voit le jour en 1996,
et il en suit lui-même la construction. Il s’agit
du Lycée Maximilien Perret à Alfortville. Celui-ci
est non seulement achevé dans les temps, mais sa construction
se révèle moins coûteuse que ce que le
budget prévoyait… Deux faits assez rares dans
le BTP pour être soulignés !
Bien entendu, grâce à une conception architecturale
« écologique », ce bâtiment est aussi
confortable et répond aux mêmes normes de sécurité
qu’un autre lycée mais est bien moins consommateur
en électricité, en eau, et en matériaux
non-renouvelables. Lorsqu’on sait que le chauffage représente
1/4 de nos dépenses d’électricité,
on imagine les économies qu’une réflexion
poussée sur l’isolation et la circulation des
courants d’air permet de réaliser.
Aujourd’hui ce sont entre 500 et 600 bâtiments
qui répondent aux critères de la norme HQE.
Créée en 1998, celle-ci n’en est qu’à
ses débuts mais lentement, quelques acteurs du secteur
commencent à s’y intéresser. La grande
difficulté de l’Association menée par
Dominique Bidou est de convaincre ces mastodontes de la construction,
mais aussi les preneurs de décisions (politiques, offices
HLM, promoteurs et investisseurs immobiliers) que cette démarche
est non seulement bonne pour l’environnement mais aussi
très rémunératrice si l’on se force
à raisonner à long terme. Moins d’énergie
et moins de consommation d’eau, autant de charges financières
qui s’envolent : propriétaires et locataires
y gagnent tous deux.
Un des rares motifs de satisfaction de Dominique Bidou jusqu’ici
est l’intérêt croissant que portent les
écoles d’architecture à cette démarche.
En effet, de plus en plus de jeunes étudiants se penchent
sur ces considérations environnementales et en commençant
par convaincre les concepteurs des bâtiments de demain,
il espère petit à petit convaincre sa cible
que pour avoir des bâtiments « durables »,
un changement radical est désormais indispensable.
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