Allen Chan - Hong Kong (Chine) - 6 Janvier 2004

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"Ma mission, prouver que les alternatives existent".


La Chine est la super-puissance de demain, tout le monde s’accorde désormais à le reconnaître. L’ouverture de son économie aux capitaux étrangers, alliée à une main d’œuvre très bon marché, fait d’elle l’usine de l’économie mondiale. Petit à petit, le pouvoir d’achat des Chinois augmente et les gigantesques débouchés de son marché intérieur permettent l’émergence d’une classe moyenne estimée à plus de 200 millions d’individus. Ce fantastique développement a de nombreuses conséquences néfastes sur l’environnement (9 des 10 villes les plus polluées au monde sont Chinoises) et l’on peut légitimement craindre une multiplication de graves problèmes écologiques dans les années à venir.

Cependant, dès maintenant, des solutions existent. Nous avons rencontré Allen Chan, le fondateur de Sino Forest, une entreprise prospère qui, grâce à un modèle innovant, lutte chaque jour contre la déforestation et le réchauffement climatique.

Allen Chan a un profil plutôt atypique. Se qualifiant lui même d’intellectuel romantique passionné d’art et de culture chinoise, il se lance jeune dans de brillantes études de sociologie. Quelques années plus tard, lassé par ses occupations de consultant et de professeur d’université, il décide de se frotter au monde réel pour prouver que ses idées peuvent être mises en pratique. Il prend rapidement la tête d’une chaîne de restaurants flottants puis acquiert une certaine notoriété en aidant des investisseurs hongkongais à monter un gigantesque complexe hôtelier en Chine. Il en fait sa spécialité et devient bientôt un des conseillers financiers préférés des investisseurs souhaitant s’implanter en Chine. Mais en 1989, suite aux événements de la place Tienanmen, tous ces investissements cessent du jour au lendemain et en quelques mois, il perd tout.

À la suite de ce désastre professionnel et financier, Allen se retire pendant deux ans, prend du recul et « réinvente » sa vie. « J’avais appris, pour être un homme d’affaire accompli et respecté, à mettre de côté mes sentiments, mes croyances, bref tout ce que j’étais. Cette période de rupture m’était nécessaire pour comprendre que cette volonté de faire quelque chose qui ait du sens était entièrement compatible avec un projet d’entreprise ».

Il s’intéresse alors, un peu par hasard, au secteur du bois et découvre que la croissance de la demande, en Chine, est une fois et demie plus rapide que le PIB. Le commerce, l’équipement mais surtout la construction (avec des taux de croissance de 20%) engloutissent chaque année plus de 300 millions de mètres cube et fait de la Chine le 2ème importateur mondial de bois derrière les Etats-Unis. Malgré cela, la consommation par habitant ne représente qu’un vingtième de la consommation américaine.

Il prend conscience des énormes opportunités qu’offre ce marché et qu’une alternative viable à la déforestation est possible, par la mise en place de « fermes arboricoles ». L’idée est simple : planter des eucalyptus et des pins, attendre 5 ans qu’ils atteignent leur maturité (c’est-à-dire qu’ils soient commercialisables sous forme de rondins et planches) et une fois coupés, replanter de nouveau. Ainsi débarrassé des coûts d’exploitation des forêts naturelles et capable d’augmenter la productivité par hectare en organisant ses plantations sans en altérer l’environnement et la biodiversité, Sino Forest peut vendre son bois jusqu’à 20% moins cher !

Le modèle est révolutionnaire, il obtient du gouvernement chinois une concession de quelques milliers d’hectares sur 50 ans en échange de 30% de la production annuelle. Mais un problème demeure : l’investissement de départ est très difficile à trouver. En 1993, après avoir essuyé de nombreux refus d’investisseurs hongkongais, il parvient à convaincre des fonds d’investissements canadiens, prêts à investir sur ce marché émergent. Il lève 5 millions d’€ et introduit sa société sur le second marché Canadien.

10 années plus tard, il exploite 200 000 hectares de forêts, emploie indirectement 35 000 personnes et réalise un chiffre d’affaires de plus de 200 millions d’€ pour un bénéfice net de 20 millions. Leader sur ce marché où il fut le premier à avoir mis en pratique ce modèle « renouvelable », il est très optimiste quant à l’avenir de sa société et prévoit d’atteindre, en 2005, une part de marché de 4%. Enfin, on peut prévoir que Sino Forest améliorera considérablement ses performances financières à l’avenir car son métier permet, même si Allen reste prudent à ce sujet, de dégager des crédits d’émissions de gaz à effet de serre, « échangeables » dans le cadre du protocole de Kyoto.

En 1998, après une importante vague de catastrophes naturelles dues à la déforestation (inondations, glissements de terrains), ayant fait plus de 4000 morts et 18 Millions de sans-abri, le gouvernement chinois a interdit l’exploitation des forêts naturelles. Ces mesures prendront du temps à être réellement appliquées, mais Sino Forest semble mieux armée que quiconque à saisir ces nouvelles opportunités de développement.

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Pour en savoir + :

Le Site de Sino Forest