Jacques Baratier - Paris (France) - 21 Fevrier 2003

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Lutter contre la pauvreté, une très petite entreprise ?

Même à 82 ans, Jacques Baratier reste un capitaine d’industrie comme on les imagine. Le regard bleu acier perçant, le verbe à poigne qui martèle ses idées comme un forgeron, le charme arrondi qui rassure quand il s’aperçoit qu’il a trop tapé. C’est dans son bureau parisien que ce personnage énergique nous a accueilli pour nous raconter son histoire.

Ancien Résistant, il est arrêté pendant la guerre puis miraculeusement sauvé par le juge militaire. Celui-ci avait, quelques années auparavant, effectué un stage dans l’entreprise familiale. Désormais convaincu qu’une bonne étoile veille sur lui, il débute une carrière dans l’industrie et développe les papeteries de Gascogne. En 30 ans il transforme cette PME en un groupe international figurant aujourd’hui parmi les 150 premières entreprises françaises.
Vous imaginiez cet entrepreneur éternel couler désormais des jours paisibles devant les émissions de Pascal Sevran ? Lui non plus… Dès 1985, il crée une association (AgriCongo) qui veut lutter contre la pauvreté en favorisant l’émergence de très petites entreprises.

Sauver de la pauvreté par le ressort même du capitalisme : l’entrepreneuriat, voilà une idée qui ressemble bien à notre homme, simple et pragmatique. La méthode est pleine de bon sens. Un terrain est demandé aux autorités locales, découpé en parcelles distribuées à des chômeurs locaux à qui l’on enseigne les rudiments de gestion, de marketing et de biologie. Au bout d’un an, la terre est à eux, ils sont devenus de vrais entrepreneurs, responsables et autonomes (et plus de 50 % sont des femmes).

18 ans plus tard, Agrisud est présent au Congo, en Angola, au Gabon, en Inde et au Cambodge et ses programmes sont à l’origine de la création de 11 800 très petites entreprises et de plus de 54 000 emplois durables.

Après 5 ans d’exploitation, 90% des entreprises créées sont pérennes et il existe même quelques « success stories », un des agriculteurs du programme possède aujourd’hui 480 cochons, deux restaurants et deux charcuteries.

Les exploitations sont réunies en groupement et une partie des bénéfices est utilisée pour financer les programmes d’éducation, d’irrigation, d’étude de marché, etc. Ces groupements sont gérés par des représentants élus et tous les comptes vérifiés par Agrisud, afin d’éviter les tentations de fraude.

Le financement de ces programmes est issu principalement d’organismes internationaux de coopération et a totalisé 7 M d’€ en 2002, bien trop peu compte tenu de l’ambition sans limite de Jacques Baratier. Sont déjà à l’étude de futures interventions au Maroc, Bénin, Mali, en Côte d’Ivoire, au Laos, au Vietnam et en Haïti.

Lorsque Jacques Baratier tente de convaincre un grand patron, son discours aussi est original, ni misérabiliste, ni culpabilisateur… Ses programmes sont, selon lui, le meilleur moyen de faire de l’Afrique un marché solvable, qui à terme constituera une réserve de croissance dont les entreprises occidentales auront sans doute besoin...

Jacques Baratier a tout sauf l’allure d’un héros sacrifié, il affirme qu’Agrisud est une entreprise, sans profit, c’est avec pragmatisme qu’il applique ses méthodes industrielles à un objectif social. Son approche repose sur le pari de la confiance et de la responsabilité. Confiance en l’homme pour s’en sortir tout seul quand on lui en donne les moyens. C’est en cela que son initiative nous a semblée remarquable.

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Pour en savoir + :

Le site d'Agrisud International