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Transparency,
Une initiative ambitieuse contre la corruption.
Il y a encore 10 ans, la corruption était un sujet
tabou. Aucune conférence, publication ou action significative
n’avait été engagée par les grandes
institutions mondiales d’aide au développement
pour y remédier. Tout le monde en connaissait l’ampleur
et les ravages sur le développement, mais personne
n’osait vraiment s’y attaquer. Il y a 10 ans,
Peter Eigen, un des directeurs de la Banque Mondiale, a brisé
le silence en créant Transparency International, la
plus importante ONG de lutte contre la Corruption.
Engagé au début des années 70 dans le
Département Juridique de la Banque Mondiale à
Washington, cet Allemand volontaire et pragmatique grimpa
petit à petit tous les échelons de « la
» Banque en s’efforçant de « faire
au mieux pour faire le bien ». Tour à tour conseiller
du gouvernement du Botswana, responsable de programmes pour
l’Equateur et l’Argentine et enfin Directeur pour
l’Afrique de l’Est, il a été très
souvent en contact avec la corruption et ses effets dévastateurs
sur le développement.
Par exemple, lors de l’attribution d’un contrat
d’infrastructure Télécoms par un gouvernement
Africain (et financé avec l’aide de la Banque
Mondiale), c’est étrangement une offre à
26 Millions de Dollars d’une société française
qui a été choisie alors qu’un concurrent
proposait une offre identique à 17 Millions ! Et sur
des projets plus importants c’est facilement 50 Millions
de Dollars de pots-de-vin sur 700 investis qui peuvent servir
à influencer les preneurs de décisions.
Mais la mission de la Banque Mondiale imposait de fermer les
yeux : soutenir financièrement les projets de développement
sans intervenir dans les affaires politiques des pays souverains.
Même si une partie des investissements d’entreprises
étrangères finissait sur les comptes en Suisse
d’hommes politiques corrompus, la majeure partie allait
bien au développement des régions et des populations
nécessiteuses. Ainsi s’accommodait la bonne conscience
des agents de la Banque.
Sauf que, Peter Eigen, lui, était marié…
Et sa femme s’est acharné à tenter de
lui ouvrir les yeux pour le faire réagir. Médecin
praticien dans les hôpitaux délabrés des
pays où son mari était affecté, elle
était chaque jour confrontée aux ravages de
la Corruption, non pas sur telles ou telles infrastructures,
mais sur des vies humaines. Chaque matin au petit déjeuner,
pendant plus de 15 ans, elle s’efforça d’influencer
son mari, allant jusqu’à manifester contre la
politique de la Banque devant les locaux de Washington !
Et puis enfin, en 1991, invité à intervenir
lors d’une conférence, Peter Eigen se propose
de lutter contre ce fléau. Ovationné pour son
intervention, il obtient le soutien d’autres personnalités
importantes de l’aide au développement, il crée
une cellule interne à la Banque Mondiale pour lutter
contre la Corruption. De retour à Nairobi, il commence
à travailler, sans savoir vraiment par quel bout commencer…
Mais 2 semaines après son intervention, il reçoit
un mot du Directeur de la Banque lui demandant de cesser de
faire du zèle et le sommant d’interrompre ses
travaux, non conforme aux statuts apolitiques de la Banque.
Déçu mais sur de lui, il démissionne
en 1991 pour rentrer à Berlin. De retour dans des appartements
spartiates bien différents des somptueuses résidences
réservées aux expatriés de la Banque,
il réactive seul ses réseaux depuis le fax de
son bureau et commence à mobiliser.
2 années plus tard, soutenus par de nombreux amis comme
le vice-président de l ‘Equateur ou le futur
président du Nigeria, il crée officiellement
Transparency International.
Aujourd’hui TI a 10 ans, et des antennes nationales
dans plus de 120 pays. Elle publie chaque année de
nombreux indices sur l’état de la Corruption
au niveau mondial. L’indice de Perception de la Corruption
est le plus connu et reflète pour chaque pays le niveau
de corruption dans le secteur public tels qu’il est
perçu par les hommes d’affaires, les analystes
et les citoyens.
Une des grandes victoires de Peter Eigen et de ses équipes
est la signature en 1997 d’une convention contre la
corruption s’appliquant pour les pays de l’OCDE.
Désormais, la corruption à l’exportation
est sanctionnée avec la même sévérité
pénale que la corruption interne dans chaque pays membres.
Une entreprise Française, par exemple, n’est
plus autorisée à payer des pots-de-vin pour
gagner des marchés à l’étranger
(avant 1997, les pots-de-vin étaient même déductibles
des impôts !!).
Le plus grand chantier de TI pour les cinq prochaines années,
selon Peter Eigen, sera de faire connaître cette convention
et les sanctions pénales qu’elle implique car
dans leur dernière étude, seuls 6% des hommes
d’affaires interrogés en connaissaient l’existence…
La corruption est un des fléaux évident qui
ronge le développement de nombreux pays. Tout le monde
s’en doute, et jusqu’à il y a 10 ans, personne
n’avait rien fait. Transparency International est la
seule ONG exclusivement consacrée à ce problème.
Et si l’ampleur de la tâche de Peter Eigen et
de ses troupes semble immense. L’action déjà
engagée méritait, selon nous, d’être
mise en avant.
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